Dès lors que l’œnophile pose son nez sur un verre de vin, il s’empresse de juger de sa qualité…pourquoi ? Car il sait quelque chose de primordial : dans le monde de Bacchus, LE VIN EST VIVANT ! Et comme tout ce qui vit, le vin peut se présenter sous des humeurs plus ou moins joyeuses. Il peut être fougueux dû à son jeune âge, il peut être pulpeux quand sa fenêtre de maturité est optimale, malade quand il présente un défaut (bouchon, acidité volatile ou caractère phénolé (dit "brett")), il peut être fatigué par le temps et même mort quand son heure est passée.

Le grand Professeur Denis Dubourdieu de la faculté d’œnologie de Bordeaux (qui nous a tristement quitté en 2016) disait souvent : "on ne vit jamais deux fois la même dégustation…"

C’est un point essentiel ! Plusieurs facteurs influencent le comportement du vin dans le verre. Tout d’abord le type de verrerie utilisé ainsi que la forme de son bol. Ensuite, la température qui doit être adaptée selon le type de vin et sa maturité.

Moins connu du grand public mais tout aussi crucial : l’oxygénation du vin. Pour amener un vin à son plus haut niveau, l’oxygénation par le carafage est souvent la solution. Cette procédure est extrêmement sensible et requiert un minimum de connaissances.


Doit-on toujours carafer ses vins ?

Surtout pas ! Pour la majeure partie des vins, l’ouverture est toujours rapide, le vin est versé et bu rapidement. Qu’il en soit ainsi ! Les « vins du quotidien » sont élaborés dans ce sens : donner un plaisir immédiat. Bordeaux supérieurs, champagne non millésimés, Vins de Pays dans la tranche 3-10€…nul besoin de carafer, ces vins n’ont pas besoin de respirer dans de grands contenants pour s’exprimer, l’oxygénation dans le verre sera suffisante.


Quels sont les vins à carafer ?

Les grands vins ! Dans l’univers des grands vins, c’est une autre histoire. A l’ouverture d’un grand cru de Vosne-Romanée, d’un grand Châteauneuf-du-Pape blanc ou d’une cuvée de Champagne millésimée, le vin doit se mettre en place. Tel un Homme après une bonne nuit de sommeil, le réveil est toujours une étape délicate où la douceur est plus que bienvenue. Vient ensuite une bonne douche permettant de le mettre en jambe afin de débuter sa journée. Il en va de même pour un grand flacon. Enfin, pour les vins sans souffre dit « natures », le carafage est quasiment automatique.


Comment savoir si mon vin à besoin d’être carafé ?

Dès l’ouverture, servez-vous délicatement un verre et jugez de son potentiel :

  • Si le vin montre des notes de réduction à savoir, très peu d’expression fruitée masquée par des notes de choux voir de gaz avec une bouche ferme et peu sapide. Carafez vigoureusement
  • Si le vin est peu aromatique et que la bouche semble serrée voir un peu dure. Carafez normalement et rebouchez.
  • Si le vin semble déjà très ouvert sur le plan aromatique, placez-le en bouche et jugez de son équilibre et de ses tanins. Si tout semble bon, versez dans des grands verres qui feront office de carafe. Oubliez-donc la carafe !


Comment carafer mon vin pour une oxygénation optimale ?

  • Si votre bouteille est couchée, placez-la délicatement dans un panier. Par cette action, les sédiments resteront collés le long du verre sans se mélanger au vin. Si la bouteille a été, comme dans les règles de l’art, positionnée debout 24 heures avant son ouverture, nul besoin de panier.
  • Procédez à l’ouverture et servez-vous une petite quantité de vin (3cl). Jugez de son niveau d’ouverture aromatique.
  • Si le vin semble fermé ou réduit, placez ces 3cl de vin dans la carafe et aviner (aviner, c’est le fait de tourner la carafe sur elle-même afin que son intérieur soit recouvert du précieux liquide). Si le vin est parfaitement ouvert, pas besoin de carafe !
  • Une fois avinée, videz la carafe dans le verre. La carafe est maintenant nettoyée de ses micro-impuretés ou odeurs malveillantes pouvant potentiellement contaminer votre vin.
  • Sur une table, pencher la carafe et verser délicatement le vin le long de la paroi. Laisser quelques centilitres de vin dans la bouteille selon la quantité de sédiments. Les plus habiles peuvent faire cette procédure à l’aide d’une bougie (comme pour une décantation d’un vieux millésime) et stopper le carafage à l’arrivée des impuretés visibles par transparence.
  • Votre vin est maintenant carafé, servez vos convives et rebouchez la carafe à l’aide du bouchon prévu à cet effet. Si besoin de plus d’air, tournez le vin dans la carafe.


Le Carré Des Vins vous recommande de pratiquer le carafage avec grande modération. Cette procédure délicate dans le geste reste néanmoins très violente pour le vin. Elle doit intervenir lorsque le vin est à servir rapidement à vos convives comme au restaurant par exemple. Une ouverture du vin quelques heures en amont de sa dégustation est toujours préférable !